Frank Boggs (1855-1926) et un autre résultat
Si Marseille est devenu une histoire de rodéos urbains, de trafic de drogue ou de règlement de compte, Marseille a aussi été cette ville grandiose que le peintre Frank Boggs (en une) et bien d’autres artistes ont dépeinte et magnifiée.
Frank Boggs est d’origine américaine, mais sa carrière est française. Élève de Jean-Léon Gérôme aux beaux arts de Paris, son oeuvre est forcément à rapprocher plus ou moins de l’art académique. N’y voyez pas de mépris! Le musée d’Orsay a depuis longtemps réhabilité ses adeptes qui aiment à raconter l’histoire et à exalter la nation. Evidemment l’impressionnisme aura aussi une influence importante sur le style de Frank Boggs. Son immense succès au Salon de 1883 lance définitivement sa carrière alors qu’il venait de tenter un retour dans son pays natal marqué par un échec complet. La société américaine n’était pas prête pour la peinture moderne française.
A partir de là, les honneurs furent multiples en France et en Europe. La Normandie restera le terrain de prédilection de Frank Boggs mais de nombreuses villes auront l’honneur d’être décrites par le peintre. Parmi celles-ci, donc Marseille. Notre grande huile sur toile (54 x 108 cm) – ce qui n’est pas l’habitude du peintre qui aime plutôt les petits formats était présentée ce 5 juin 2024 par la maison Audap à Drouot. Elle trouva preneur à 13 846 €, juste un peu au-dessus de l’estimation. Les amateurs auraient peut-être été plus nombreux sur les bords de la Méditerranée…
Je voulais aussi parler d’un résultat le même jour à Drouot lors d’une vente de la maison L’Huillier. Elle se déroulait classiquement avec quelques invendus bien camouflés par le commissaire priseur qui faisait semblant d’avoir un acheteur. Ils utilisent pour la plupart ce subterfuge pour garder une dynamique à la vacation, mais là c’était un peu trop lourd… Le lot qui nous intéresse a en revanche bel et bien été vendu.
Il s’agit d’un chien King Charles (ci-dessus, hauteur 27,4 cm) en terre cuite du XVIIIe siècle sculpté par Augustin Bocciardi (1729-1797). Le catalogue est très disert sur l’artiste. Sculpteur-marbrier, ornementiste et figuriste mais également aussi lapidaire, retenons que le génois travailla pour Marie-Antoinette et pour le roi Louis XVI aux menus-plaisirs de Versailles sans jamais négligé sa clientèle privée. Il est probable que notre terre cuite fut commissionnée directement au sculpteur par un membre de la famille royale ou de sa cour.
Avec une telle aura, l’estimation entre 5000 et 8000 euros ne pouvait qu’exploser. La bataille s’engagea entre un client de l’experte au téléphone avec lequel elle parlait en anglais et un marchand dans la salle, galeriste à coté de Drouot, qui devait avoir l’ordre d’un amateur. L’anglophone tergiversait pas mal, jouant au plus fin, mettant de petites enchères alors que le marchand respectait les paliers d’enchères. Ce dernier finit par obtenir son lot à plus de 45 000 €! L’experte qui aurait probablement eu une enveloppe de la part de son client s’il avait eu l’oeuvre convoitée, avait l’air déçu.
Frédéric Le Quer
Si Marseille est devenu une histoire de rodéos urbains, de trafic de drogue ou de règlement de compte, Marseille a aussi été cette ville grandiose que le peintre Frank Boggs (en une) et bien d’autres artistes ont dépeinte et magnifiée. Frank Boggs est d’origine américaine, mais sa carrière est française. Élève de Jean-Léon Gérôme aux beaux arts de Paris, son…