Tu seras un retraité, mon fils

Tu sera un retraité mon fils,

Si tu peux voir ta vie détruite par le travail

Et sans dire un seul mot te lever le matin

Ou perdre ton boulot du jour au lendemain

Résigné, sans mot dire et sans même un soupir

Si tu peux tout donner sur ton lieu de travail

Si tu peux être fort sans faire de burn out

Te sentant rejeter aimer ton entreprise

Te défendre en admirant ton boss

Si tu peux supporter d’entendre tes paroles

Travesties par tes collègues qui veulent prendre ta place

Et d’entendre mentir sur toi leur bouche folle

Sans mentir toi-même d’un mot

Si tu peux rester digne en étant populaire,

Si tu peux rester peuple en conseillant tes maîtres

Et si tu peux aimer tous tes collègues en frère,

Sans qu’aucun d’eux ne soit pour toi ;

Si tu sais cotiser pendant des décennies

Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,

Rêver quarante trois ans tes plus belles années

Sans penser au retraité épuisé que tu deviendras;

Si tu peux être dur et ne jamais faiblir

Si tu peux être brave et n’être pas gentil,

Si tu sais être injuste, sans la moindre pitié,

Sans moral, jamais quand tu es au travail

Si tu peux conserver ton job toute ta vie

Quand tous les autres le perdront,

Alors la sécurité sociale, agirc-arrco et ta caisse de retraite

Seront à tout jamais tes esclaves soumis,

Et, pour finir ta vie malade, sans plus d’envie

Te feront l’aumône quelques temps d’une rente rabougrie

Tu seras un retraité, mon fils.

Rudyard Kipling mis au goût du jour par Frédéric Le Quer

Tu sera un retraité mon fils, Si tu peux voir ta vie détruite par le travail Et sans dire un seul mot te lever le matin Ou perdre ton boulot du jour au lendemain Résigné, sans mot dire et sans même un soupir Si tu peux tout donner sur ton lieu de travail Si tu peux être fort sans faire…

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