Au restaurant casher

Mon ami et moi entrâmes dans un petit restaurant casher de Saint Mandé à l’heure du déjeuner. G connaissait un peu le lieu. Le patron fut heureux de le revoir. Il me présenta. Il n’y avait encore personne. La télé était allumée. La chaîne d’information de Bolloré y égrenait des nouvelles toutes plus catastrophiques les unes que les autres.

-Ils écoutent Cnews, dis-je à G.

Il n’était pas surpris. Ma remarque plutôt lui sembla incongrue.

-Et, oui; c’est la seule qui soutient la communauté juive. Les autres, c’est une honte.

Qui aurait pu croire qu’un antisémitisme décomplexé aurait encore droit de citer dans les médias en France après la seconde guerre mondiale? On en était là 80 ans après les camps de concentration par la faute d’un homme politique qui se servait du communautarisme islamique comme tremplin vers le pouvoir. On en était là parce qu’un président de la république refusait de défiler contre l’antisémitisme par peur de déplaire à une partie de la population habitée par la haine des juifs. On en était là parce que cette partie de la population tendait à substituer à nos valeurs judéo-chrétiennes, une culture allogène vindicative.

Une femme entra dans le restaurant casher et s’assit à une table près de l’entrée. C’était une habituée. Immédiatement elle interpella le patron en souriant.

-Alors, lundi tu seras encore là?

Ce dernier essaya de rire. Il savait qu’il n’y avait pas de quoi puisqu’il savait de quoi la cliente parlait. Mais il faudrait bien qu’il ouvrît lundi quel que soient les résultats des élections. Sa vie n’était pas en Israël, du moins pour le moment. Et puis là-bas, la guerre avec le Hezbollah était toute proche.

Il semblait avoir 50, 60 ans. C’était un séfarade. Lui et ses parents s’étaient enfuis d’Afrique du nord probablement, s’étaient installés en Seine-Saint-Denis puis avaient probablement déménagé à Sarcelles. Ils avaient un peu tous le même parcours, un parcours semé d’embûches, de déménagements, de travail acharné pour mener vers une assimilation dont ils étaient fiers. Il y avait de quoi. Rien ne leur avait été donné. Ils s’étaient battus et ce combat pour la vie avait créé un ciment indéfectible les liant à la France. Ce ne sont pas les aides qui lient, c’est le courage. Les plus aisés avaient quitté Sarcelles qui devenait de moins en moins accueillant pour eux vers la très gentrifiée ville de Saint Mandé coincée entre Paris et le bois de Vincennes.

Un jeune serveur nous apporta quelques crudités pour patienter. G nous avait commandé des pâtes servis avec une cuisse de poulet aplatie et une sauce un peu relevée pour que je goûte. Nous parlâmes politique un moment. Je me souviens, il y a 20 ans, quand je lui disais ce qui nous pendait déjà au nez, lui haussait les épaules, jouait les centristes ouvert d’esprit et ouvert à l’autre. Aujourd’hui il est effrayé à l’idée de devoir partir de France un jour ou l’autre.

Les juifs d’abord; les chrétiens ensuite. ça se dit de plus en plus. Mélenchon ne craint pas de pointer du doigt les français de souche qui sont un obstacle à sa nouvelle France. Une France déclassée, comme tous ces pays d’Afrique et du moyen orient qui n’ont strictement rien apportés au monde depuis que l’islam les a conquis. « Quand vos ancêtres ramassaient des glands dans la forêt, les nôtres construisaient des palais », vient de déclarer l’insoumise Rima Hassan. Elle ne se rend même pas compte que c’était bien avant que l’islam n’existât, au moins un millénaire avant, mais qu’après…

G votera RN dimanche. Il le fera la mort dans l’âme parce qu’il pense à son père et à cette époque où Jean-Marie Le Pen sortait ses scandaleuses sottises, en riant d’un jeu de mot horrible « Durafourcrématoire », ou en s’essayant au négationnisme style « détail de l’histoire ». Mais Marine Le Pen n’est pas la même bien qu’elle a été élevé dans ce milieu. Et puis ne suffit-il pas de l’entendre vilipender l’antisémitisme? Le simple fait qu’elle se déclare contre l’antisémitisme est évidemment énorme.

Une centaine de personnalités juives et non juives appellent ce matin à faire barrage à l’union des gauches. L’ancien président du CRIF déclare qu’il votera RN. La communauté juive de Saint Mandé écoute Cnews et a peur de l’avenir. Bardella l’aidera surement s’il gagne.

G régla l’addition et se dépêcha de partir à son rendez-vous. On s’était régalés dans ce restaurant casher, mais il faut bien continuer à travailler!

Frédéric Le Quer

Mon ami et moi entrâmes dans un petit restaurant casher de Saint Mandé à l’heure du déjeuner. G connaissait un peu le lieu. Le patron fut heureux de le revoir. Il me présenta. Il n’y avait encore personne. La télé était allumée. La chaîne d’information de Bolloré y égrenait des nouvelles toutes plus catastrophiques les unes que les autres. -Ils…

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